Dans ma pratique de psychologue du travail je reçois et j’accompagne des personnes en épuisement professionnel. Elles ont dépassé leurs limites en n’osant pas dire non, en supposant qu’elles feront face quoiqu’il en coûte, comme elles l’ont toujours fait dans leur carrière. Et quel que soient les âges, ces personnes peuvent se retrouver dans un état d’épuisement qu’elles n’ont jamais connu à force de prendre sur elle et de compenser les manquements de leur organisation du travail. Le travail peut conduire à un épuisement physique et psychologique mais la vie de famille aussi.

On parle peu, très peu de l’épuisement des mères ! Et pourtant elles sont plus nombreuses chaque année à venir consulter par culpabilité de ne plus pouvoir faire face. Certaines sont soutenues par leurs médecins ou psychiatres qui leur prescrivent des anti-dépresseurs. Comme ces salariés qui me consultent à cause de leur travail, qui se sentent coupables d’être placés en arrêt maladie parce-qu’ils n’en peuvent plus, ces mères craignent de s’effondrer.

Dès que les mères se plaignent de leur condition, elles culpabilisent pensant qu’elles ne sont pas capables, qu’elles sont de mauvaises mères. Les pensées de ces femmes à propos de leurs enfants sont taboues et restent confinées dans une sphère très privée (entre amie ou chez leur thérapeute). Ce texte est une façon de leur rendre hommage car être maman est un métier à plein temps, sans vacances. Cela demande de l’abnégation.

Violaine Guéritault présente dans son ouvrage de nombreux témoignages de mères de France ou des Etats-Unis et relève de nombreux points communs entre elles. Elle avance le fait que « la société attend une performance exemplaire de la part des mères sans que leur soient accordées les ressources nécessaires pour répondre à cette attente ». Cela m’a interpellée car nous disons la même chose pour les salariés en épuisement professionnel.

Leur vécu est sans cesse interprété nous dit Violaine Guéritault : « Si elles sont épuisées, débordées, ou chroniquement en retard, c’est forcément parce qu’elles sont complètement désorganisées. S’il leur arrive d’être agressives, colériques ou à bout de nerfs, c’est sans doute à cause de leur émotivité exacerbée et incontrôlée ou bien encore à cause d’un cas de syndrome prémenstruel aigu. Si finalement elles s’effondrent, c’est parce qu’elles souffrent de dépression due à une nature vulnérable et que les médicaments devraient soulager afin qu’elles retrouvent une productivité capable de satisfaire les besoins de tous ceux qui les entourent. »

J’invite les mères et les pères à lire les conseils de Violaine Guéritault en chapitre 12. Elle ne propose pas de remèdes miracles, tout comme pour le burn-out professionnel il n’y en a pas, mais elle fait la liste des éléments auxquels il faut être vigilants pour éviter de s’épuiser comme :

– Ne pas rester seule,
– Demander de l’aide,
– Etablir une répartition des tâches équitables dans le foyer au moment d’y accueillir un enfant,
– Abandonner certaines tâches qui peuvent être considérées moins essentielles,
– Tenter de faire au mieux plutôt que parfaitement,
– Apprendre à prendre soin de soi… etc.

Et j’ajouterais, communiquer, communiquer, communiquer ! Pour accompagner de nombreux couples, je constate que la communication est la source principale de leurs difficultés. Parfois, pour certains, il n’est pas aisé de dire à son bien-aimé ou à sa bien-aimée ce qui déplaît.

Mais garder pour soi des malaises, des non-dits ou ne pas exprimer ses besoins, ne pas poser ses limites, conduit à laisser s’entasser des branches sur le pont de la communication. Le risque est l’éloignement et la rupture relationnelle, chacun se trouvant sur une rive. Plus vous cumulez de branches sur le pont, plus il sera long et difficile de les retirer ! Alors essayez, de retirer petit à petit, au fur et à mesure, les branches de votre pont relationnel pour vous sentir plus libre et respecté dans vos besoins.